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Donner du sens au travail


Été 2018, Patrick Pouyanné, PDG du groupe Total dont je suis encore employé, affiche son engagement en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique et le déclin de la biodiversité, en assurant que Total est une partie du problème mais aussi une partie de la solution. Mes collègues bercés à coup de clip corporate « Total major de l’énergie responsable » qui tourne en boucle dans les ascenseurs de l'entreprise, s'en réjouissent et s'empressent de partager l'info sur les réseaux sociaux, comme je l'aurai probablement fait il y a quelques années.


De mon côté, fraîchement rentré d'une année sabbatique en écovolontariat, la crise climatique est une triste réalité et mon constat tout autre : Total consacre toujours 94 % de ses investissements à l’exploration et au développement de gisements pétroliers et gaziers et confirme ses forages à proximité du récif de corail de l’Amazone menaçant la biodiversité au Brésil et en Guyane. Et pour alimenter sa bioraffinerie de La Mède, Total demande et obtient une dérogation du gouvernement pour importer de l'huile de palme, responsable de déforestation massive et du massacre de l'orang-outan en Indonésie.



" A l'urgence climatique, l'immobilisme est irresponsable, la dynamique du surplace suicidaire. "



Il y a la parole et les actes, qui peut croire qu'en augmentant les problèmes actuels, on apporte de futures solutions. L’incohérence est nourrie entre intention, discours et réalité. Mais le pire pour la lutte contre le dérèglement climatique et l'effondrement de la biodiversité, ce n'est pas qu'un grand acteur économique comme Total soit dans l'inaction mais bien qu'il fasse croire qu'il agit. A l'urgence climatique, l'immobilisme est irresponsable, la dynamique du surplace suicidaire. D’après l’Accord de Paris sur le climat, 50% des ressources fossiles déjà connues doivent rester inexploitées si l'humanité veut limiter le réchauffement à 1,5 C°. Continuer à chercher de nouveaux gisements d'hydrocarbures m'apparaît comme une hérésie, en totale contradiction avec mes convictions.


La dissonance cognitive bat son plein. Je produits le plastique à usage unique que je ramasse sur les plages, je suis le collaborateur de Monsanto qui va au travail à vélo, le pompier pyromane des discours de Cyril Dion, j'entretiens un feu la semaine que j'essaie d’éteindre le week-end. Je n'ai pas d'enfant, pas de crédit maison et quelques économies. J'ai le luxe de la liberté, et comme le slam Kalune, la force de tout quitter, mon patron, mon confort et ma petite vie bien meublée.

Je passe du consomm'acteur au collabor'acteur. Parce qu’on consacre en moyenne plus d'un tiers de sa vie au travail, ne plus travailler pour l’un des plus gros pollueurs de la planète, c’est déjà agir.


Aujourd'hui, j'œuvre dans une ONG, je cultive mon potager agroécologique et démarre une reconversion professionnelle en environnement. Je me lève le matin et fais correspondre mes actions aux valeurs que je porte. Moins d'argent mais plus de temps, l'engagement qui donne du sens à la vie, c'est peut-être ça les premiers pas vers la sobriété heureuse.





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